jeudi 24 juillet 2008

LA MOLA



Je me passionne pour les cultures amérindiennes (terme qui désigne plutôt les indiens d’Amérique du Nord). Il est aussi vif pour l’ensemble des Indiens d’Amérique, de l’Arctique à la Terre de Feu, de même pour les Kanak, les Aborigènes d’Australie, ou de Mélanésie, en fait toutes les cultures primitives qui nous ramènent à nos origines, aux liens spirituels avec la Terre-Mère. J’aime beaucoup les motifs qu’emploient les tribus dans leur art, riches en symboles de toutes sortes. Et dans toutes les techniques de patchwork ancestrales il y en a une qui m’interpelle particulièrement : la Mola réalisée par les femmes Kuna du Panama. Elles créent des motifs appliqués uniques suivant une technique qui ressemble à celle des Môns en Asie du Sud-Est. Elles semblent ainsi perpétrer une ancienne tradition de peinture et de tatouage corporels quand elles ornaient leur corps et celui des hommes avec des teintures de couleurs primaires obtenues à partir d’écorce, de terre, de plantes et de baies. Elles dessinaient alors des oiseaux, des animaux, des hommes, des arbres, et d’autres choses encore, sur toutes les parties du corps, mais surtout sur le visage.


LE PANAMA


L'image classique du Panama est celle de son fameux canal, de ses gratte-ciels au milieu de la capitale, peut être de quelques plages de sable fin. Le Panama est néanmoins le pays d'Amérique Centrale après le Guatemala où l'on trouve le plus de tribus indigènes ayant gardé presque intacte leur culture. Les Kunas qui représentent plus de 50.000 habitants sur une population globale de 2.900.000 personnes, sont un peuple exceptionnel encore peu connu des voyageurs dont je rêve d’être.



LES KUNA
Le peuple Kuna descend des Mayas, métissés aux indiens d'Amazonie. Peuple guerrier depuis des générations, les Kunas ont réussi à garder leurs traditions ancestrales, tout en s'ouvrant à la modernité. Ils vivent aujourd'hui dans 49 communautés du Panama. La majeure partie se situe dans l'archipel de San Blas, Comarca semi-autonome de Kuna Yala, sur la côte caraïbe du pays. On dit de ses îles entourées d'eau turquoise qu'il en existe suffisamment pour en découvrir une nouvelle chaque jour de l'année.


LES FEMMES KUNA
Alors que les hommes Kunas s'habillent de T-shirts et pantalons classiques, les femmes portent des robes colorées et des Molas traditionnelles. Les femmes Kunas se parent de bracelets de perles multicolores appelés Winis, ou Chaquiras en espagnol, sur toute la longueur de leurs bras et de leurs jambes. Elles peuvent tisser les perles de leurs bracelets avec des motifs rappelant leurs mola. Selon leur croyance, ces bracelets les protègent des mauvais esprits. Les femmes ont généralement les narines transpercées par un anneau d'or, et tracent sur leur front une petite ligne verticale avec une peinture noire à base Jagua, fruit de palmier.
(Photo vue sur Internet)


Tiré du RÈGLEMENT D'UTILISATION DU DROIT COLLECTIF, voici la définition de « MOLA KUNA PANAMA » ou Morra Kuna Panama :
« Appliqué d'un petit morceau décoratif à une pièce plus grande, travaillée à l'envers. Combinaison de tissus aux couleurs variées et voyantes. La technique employée se base sur la broderie artisanale (appliqué). Elle est confectionnée à la main par les femmes Kuna, à deux épaisseurs, ou plus, de tissu coupé et collé un par-dessus l'autre pour laisser entrevoir les couleurs des couches inférieures. Certains motifs de la Mola sont basés sur la vision cosmique du peuple Kuna, et d'autres sont simplement des figures géométriques ou inspirées de la nature. MOLA KUNA PANAMA signifie également la robe de la femme Kuna, appelée dule mor ».
C’est peut-être un peu compliqué à comprendre quand on n’a ni vu de près ni pratiqué, d’autant qu’il s’agit certainement d’une traduction de l’idiome Kuna en langue espagnole puis en Français.
« Les innovations réalisées à partir de la Mola démontrent que les connaissances du peuple Kuna ne sont pas statiques, qu'elles sont en constante évolution : de plus, la Mola ne s'utilise pas seulement comme costume des femmes Kuna, mais aussi pour des étuis à lunettes; couvertures de coussins et d'appareils de cuisine, nappes, vêtements pour bébés, masques, ceintures, bandeaux, décorations de Noël, vestes, poignées, chapeaux, cols et manches de robes, sacs et autres accessoires. »
Ces brodeuses représentent tout ce qu’elles voient : les animaux, les personnages, les scènes de la vie quotidienne, mais aussi ce que les hommes auront troqué contre des noix de coco : bouteilles de gaz, scies, tronçonneuses, brosses à dent, « ailes de chauve-souris » (parapluie), pantalons, etc. Tout est prétexte à l’invention de nouvelles molas ; personnages de dessins animés, étiquettes de boîtes de conserves, logos publicitaires font aujourd’hui partie du répertoire des motifs conventionnels. Certaines sont si habiles qu’elles sont capables de découper le tissus sans avoir dessiné leur modèle au préalable.

LES TISSUS
Si les couleurs n’ont pas changé, ce n’est pas le cas des matériaux. Autrefois le coton était teint localement, récolté et filé par les filles, les mères tissant toujours exactement la quantité nécessaire pour l’objet à confectionner – hamac, jupe, tunique ou couverture – sans qu’il soit nécessaire de couper le tissu. Désormais, elles achètent coton ou synthétique aux Américains de même que le fil. Les filles commencent à coudre à l’âge de six ans ; lorsqu’elles se marient elles ont ainsi une vingtaine de blouses aux couleurs vives de mola appliquées sur le devant et le dos. Elles coudront toute leur vie de femme aussi longtemps qu’elles verront clair.



LES COULEURS
A l’exception de la première et de celle de la femme Kuna, les photos des véritables molas présentées ici ont été prises avec l’autorisation de l’Association La Route des Sens qui proposait ses voyages sur un stand du Festival de Thau l’été dernier à Mèze (Hérault)*.
Ce n’est qu’une fois la planche-contact éditée que j’ai remarqué que le rouge domine.
* « Manifestation engagée et citoyenne qui rend compatible la fête, la musique cosmopolite, l’ouverture sur le monde et la réflexion humanitaire, environnementale et sociétal »



VENTE DES MOLA
Autrefois, il était interdit de vendre ses mola. C’était tabou. Les mola accompagnaient leur propriétaire jusque dans la mort.
Désormais, on peut en acheter directement sur place si l’on a la chance de pouvoir se rendre au Panama et de rencontrer les Kuna, ou à la « Coopérative des Mola » de Panama Cuidad.
Un site aussi pour acheter ou simplement se régaler de la vue de véritables mola : rendez-vous sur
www.rainforestjewel.com



LE TOURISME SOLIDAIRE ET EQUITABLE
Si comme moi le voyage vous tente, vous pouvez faire appel à des voyagistes de « Tourisme Solidaire et Equitable » .
Ce type de voyages est directement lié à l’aide au développement et affirme une volonté de respect de l’être humain et de son environnement, la compréhension des différences et une économie équitable.
Les communautés villageoises à l’origine du projet, mettent en place, animent et organisent l’accueil du « touriste solidaire ». C’est une économie directe et équitable. Six pour cent du montant du voyage est destiné à financer leurs actions de développement (vérifiable sur place).


LE VOYAGE
Cette façon de voyager en petits groupes (5 à 10 personnes maximum) permet de participer à un échange constructif, tout en prenant plaisir à découvrir l’autre et son pays. Basés sur la rencontre et l’échange ces voyages rapprochent le voyageur des richesses culturelles, humaines et environnementales.
Ce n’est pas tout à fait Koh Lanta, mais pour qui aime le confort d’un ***** avec clim et piscine, s’abstenir !!!

Voici deux adresses :
www.rtedsens.org
www.ecotours.com.fr


DES FILMS
Si l’on veut rêver sans se ruiner, il y a une autre façon plus économique de voyager : la vidéo. J’ai vu l’excellent documentaire « MOLAKANA – Coudre le Monde » réalisé par Michel Perrin, Ethnologue et Directeur de recherche au CNRS. Il est de plus commenté de façon originale.
Il date de 2002, mais on peut encore en obtenir une copie (je pense) à l’adresse suivante :

Michel PERRIN, CNRS
1 PLACE ARISTIDE BRIAND
F-92190 MEUDON

Il existe un autre documentaire intitulé « LE PARADIS PERDU DES INDIENS KUNA » produit par Archipelago Film. Je ne l’ai pas vu mais je ne crois pas qu’il soit uniquement dédié à la Mola comme le précédent.
UN LIVRE
« Tableaux Kuna » chez Arthaud/Flammarion (1998)


ET POUR FINIR
Mes mola à moi. Ici la mola du poisson. Très dépouillée ! C’était la première et j’avais hâte d’en terminer avec ce travail que j’avais trouvé fastidieux, et pas très facile à réaliser.



LE TOUCAN
Je préfère celle-ci. J’ai vu moins grand. Ce n’est qu’une pâle imitation. Elle est néanmoins construite à la façon des mola des kuna mais n’a rien à voir avec la richesse de leurs motifs !